Benjamin Graindorge, entrevue.

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Benjamin Graindorge possède un trait subtil et génial, qui insuffle à ses créations une pâte qui lui est propre. Alors que je me m'interrogeais sur l'interaction entre conception 3D et dessin manuel, son expérience m’as permise de comprendre d’avantage la nécessité de l’usage du dessin.
L'objet dont nous parlons est un vase imprimé par fabrication additive (ou imprimante 3D) intitulé: Ikebana Medulla, inspiré de l'art traditionnel japonais, ou l'art de faire vivre les fleurs, conçu lors de sa résidence à la Villa Kujoyama de Kyoto.
J'ai ajouté son interview d'Aude Lavigne, sur #franceculture au sujet de la pratique du dessin chez les designers.

Par quelles étapes de dessin êtes-vous passé pour réaliser cet objet ?

J’étais au Japon à ce moment là pour la résidence Kujoyama à Kyoto et j’avais beaucoup de temps libre. J’ai pu alors dessiner cet objet sous tous les angles, faire des coupes et des vues diverses. Il arrive en général souvent que le dessin manuel soit modifié ou transformé par le passage à la CAO, mais pour celui-ci, j’ai passé tellement de temps à me concentrer, que lorsque j’ai réalisé le dessin en 3D je savais exactement où je voulais aller et le résultat est conforme à mon dessin.

Est ce que le logiciel vous contraint dans la réalisation des formes ?

Aujourd’hui je peux réaliser tout ce que je veux avec Rhinoceros. Je suis d’accord que les outils 3D induisent un dessin, mais ma pratique de Rhinoceros me permet de concrétiser mes dessins. On a aussi l’outil en tête et la manière de la produire lorsqu’on dessine manuellement. Lorsque je réfléchis à un projet, je passe d’abord beaucoup de temps à le dessiner à la main. C’est beaucoup plus intuitif et rapide de travailler manuellement au départ, pouvoir changer le dessin, gommer, le modifier et travailler ensuite en 3D et en tirer des plans, des images. On a beau dire mais la 3D prends beaucoup de temps.

Que vous apporte la fabrication additive par rapport à d’autres outils traditionnels ?

C’est un moyen comme un autre de créer, comme je pourrais aussi le faire avec des artisans. Depuis un certain temps je travaille plutôt de cette manière. Mais il n’y a pas que le dessin qui conditionne une forme, mais aussi l’outil. Lorsque je vais travailler avec des artisans j’ai des coupes, des vues, des plans précis, qui seront modifiés par les outils de l’artisan et leur capacité à produire ces formes.

Quand vous travaillez avec des artisans arrivez-vous toujours avec une image précise ?

Ça varie. En général j’arrive avec des plans précis qui seront ensuite discutés et modifiés, mais il arrive aussi que ce soit plus flou et que la discussion amène une idée plus précise. Il y a souvent des allers retours, je développe les 3D et les dessins après les discussions .

https://www.franceculture.fr/emissions/la-vignette-13-14/benjamin-graindorge. Extrait de France culture, émission La vignette 13-14 par Aude Lavigne

Vous dessinez beaucoup et c’est une caractéristique qui n’est pas forcément commune ?

Je ne sais pas si c’est commun ou pas. Je crois que malgré tout ça commence à le devenir car on se rends compte que le corps est important autant que l’esprit. Finalement le dessin est très lié au corps, à la main, au bras. Je trouve que c’est très lié à la chair et au fait qu’on soit vivant.

Parce qu’il y a des logiciels, qui sont très utilisés par le designers... ?

Je les utilise aussi c’est juste que pour moi c’est plutôt complémentaire. Je commence tout à la main, mais il y a des allers retours qui sont très forts et nombreux entre la 3D de représentation numérique et la main.

Oui peut-être que ces logiciels peuvent avoir des inconvénients, comme arriver au même produit ?

Je ne suis pas complètement d’accord. Les logiciels 3D ne seront jamais aussi doués qu’un crayon et une main, ils sont trop jeunes, mais ce sont des outils très intéressants. Comme ils sont contraints, ils proposent des nouvelles formes, il faut juste être capable de ne pas les rendre trop caricaturales. On dessine depuis qu’on est tout petit, alors on est plus à même de trouver des choses plus particulières avec la main.

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